Josepho a douze ans et a été baptisé voici une semaine. Le Père l’a donné en exemple à ses compagnons de classe, car il sait son catéchisme sur le bout du doigt C’est d’ailleurs pourquoi il porte aujourd’hui autour du cou un chapelet plus beau que celui de ses camarades. Personne cependant ne le jalouse, car tous savent que c’est une récompense méritée et que par ailleurs Josepho est le plus aimable garçon de l’école. Hier encore, il est parti avec deux maigres poulets pour acheter des remèdes à sa bonne maman qui est très malade. Josepho l’aime tellement !
Hélas, il sera bientôt orphelin, murmure-t-on autour de lui et il est le seul catholique de toute sa famille ! Cependant, tout ce que l’enfant a appris au catéchisme, il l’a redit et expliqué du mieux qu’il a pu à sa mère. Le Père a dit que celui qui meurt aussitôt après son baptême va droit au Paradis. Josepho voudrait bien voir sa maman heureuse auprès du « Grand Dieu des Blancs », car elle a toujours été bonne pour lui. Mais comment faire ? Toute la famille s’oppose au baptême de la malade. L’année précédente quelqu’un n’est-il pas mort au village peu après avoir été baptisé ? C’est le missionnaire qui lui avait jeté un mauvais sort, a murmuré le sorcier…
Si aujourd’hui la mère de Josepho devient chrétienne elle mourra certainement aussitôt après ! Triste raisonnement de ces pauvres Noirs victimes de leur ignorance et esclaves de leurs sorciers ! La mère de Josepho ne les connaît que trop bien… Aussi donne-t-elle à son fils des conseils de prudence. « Josepho, si je meurs baptisée, tu seras chassé de la famille ! Où iras-tu alors ? » Et pourtant le missionnaire l’a dit : « Celui qui meurt aussitôt après le baptême entre tout droit au ciel ! » Et cette nuit sera peut-être la dernière que maman passe sur la terre, songe Josepho. Que faire ?