Des histoires pour le mois novembre, la Commémoration des fidèles défunts et les âmes du Purgatoire.
Ayant pour thèmes : Commémoration des défunts, Purgatoire, Viatique, Mort, Bonne mort, Extrême-Onction, Mort pour la France
Que ce calice…
Seule vivante en nous la douleur, la douleur être jailli de nous, plus vivante que nous, Mais image de Dieu, image de sa grâce, Et Dieu même dans notre chair… Dieu rongeant notre chair, Comme sa grâce ronge l’âme. Le corps même a bu le Vin Nouveau, a bu l’Esprit. Voici les possédés de Dieu, les corps fous comme des âmes, les corps dévorés de joie, torches de joie, grésillantes résines, les corps si pleins de Dieu qu’ils éclatent ! Quand il eut écrit ces lignes, Georges Le Noir se reposa. Et de fait, il avait besoin de se reposer. Il devait se reposer. Rien ne coûte tant que le travail intellectuel ! O Forts, qui coltinez, marchant à petits pas, des tonnes et des tonnes ; laboureurs aux mains calleuses, qui poussez la charrue et la tenez droite au sillon ; forgerons, qui levez la masse énorme au-dessus de l’enclume, parmi le jaillissement des étincelles blanches, vous ignorez l’effort et sa fatigue, vous ne savez rien du vrai travail ! Georges Le Noir avait mérité quelques …
lire la suite…Une leçon de catéchisme
Le Père Middlelon, au catéchisme, avait parlé avec douceur et insistance de la miséricorde de Dieu. 1l avait tout d’abord dit quelques mots sur la nécessité de la contrition puis il avait posé des questions aux élèves afin de s’assure qu’ils avaient bien compris sa pensée. « Harry Quip, commença-t-il, répondez-moi. Supposez mon ami, que vous êtes un grand pécheur : depuis que vous avez l’âge de raison, vous avez commis péché mortel sur péché mortel. Toutes vos fautes souillent encore votre âme, toutes vos confessions ont été mauvaises, et vous apprenez subitement que vous allez mourir, ici même, dans cette classe. Faut-il désespérer ? — Non, Père, répondit Harry. Je demanderais à la Saint Vierge, notre Mère bénie, de m’obtenir la grâce de faire un bon acte de contrition, et je me confesserais, m’abandonnant dans les bras de la miséricorde de Dieu. — Mais voici, Carmody, continua le professeur, vous n’avez jamais fait une seule bonne action, et d’un autre côté, vous avez sur la conscience …
lire la suite…Le bouquet de Lucette
Le ciel est bas et gris. Bientôt, novembre sera là, et les grands arbres, déjà, perdent leur chevelure d’or. Cinq heures sonnent lentement au clocher de l’église. La porte de l’école s’est ouverte ; on entend les rires des fillettes, clairs et joyeux en cette soirée d’automne. Quelques bavardages encore… puis tout le monde se disperse ; les unes vont à la laiterie, les autres rentrent vite chez elles où les attendent quelques leçons à apprendre. Dans un petit groupe d’écolières qui prennent ensemble le chemin du retour, Lucette s’avance avec ses amies Renée et Marie-Thérèse, dont les yeux rieurs et les joues rouges comme des pêches, contrastent avec son petit visage pâle où deux grands yeux gris semblent, aujourd’hui, plus tristes qu’à l’habitude. Et, tandis que les souliers claquent gaîment sur les pavés, on parle de choses sérieuses. « Ils seront sûrement en fleurs pour la Toussaint, dit Renée, tu as vu, avant-hier, comme les boutons étaient larges ? Eh bien, ils ont encore grossi et ils vont …
lire la suite…Je me vengerai
Commémoration des défunts Devant la porte de la salle de classe, les élèves s’apprêtent à entrer pour subir les épreuves du certificat. Un à un, on les appelle et ils vont s’installer au bureau que leur indique le surveillant. « Robert Lenoir… Bernard Lernier… » Robert, furtivement, a glissé un coup d’œil à Bernard. Tous deux sont de la même école. Robert Lenoir, élève médiocre, peu scrupuleux, n’a pas travaillé beaucoup durant l’année. C’est un bon cœur, mais, malheureusement, il lui a manqué, dès son jeune âge, l’influence d’une mère, morte lorsqu’il avait quatre ans. Il ne lui reste que sa grand-mère, qui l’aime beaucoup mais qui n’a sur lui aucune autorité, et son père, trop pris par les affaires, ne s’occupe guère de lui. Bernard, au contraire, est travailleur. Très ambitieux, il arrive toujours dans les premiers de sa classe. Aussi, Robert se réjouit d’être placé près de son camarade. * * * Les candidats, après avoir rendu leurs rédactions, commencent maintenant la composition de calcul. « Hem !… Bernard… » Bernard a levé la tête …
lire la suite…Le cortège de Jean-Paul
Extrême-onction Il y avait du soleil plein le ciel, des chants d’oiseaux plein le verger. Et Jean-Paul chantait aussi sa joie de vivre en cueillant à plein panier les cerises rutilantes du beau cerisier… Soudain, un craquement, un double cri : Jean-Paul tombait du cerisier sur la terre dure, et sa mère accourait, épouvantée. Ce fut aussitôt un grand affairement : brancard, coups de téléphone, médecin… Et le terrible diagnostic, courant de bouche en bouche : « Il est perdu… il ne lui reste plus qu’une heure à vivre… » Pâle sur son lit, souffrant atrocement, Jean-Paul sent bien lui aussi que sa vie s’en va. Alors il appelle sa maman : — Je vais mourir, dit-il doucement, mais il ne faudra pas pleurer : je vais au ciel. Puis il ajoute : — Les copains du « caté » vont sûrement venir avec Monsieur le Curé. Dis, tu les laisseras entrer ? Les parents de Jean-Paul ne sont pas « gens à curé », comme ils disent. Mais refuseraient-ils une dernière joie à leur enfant ? Jean-Paul, lui, attend. Car au catéchisme, le jour où …
lire la suite…La première et la dernière communion de Léon
Tandis que M. le Régent est en conversation avec le nouveau Vicaire, les garçons de la deuxième classe se demandent s’il sera sévère ou indulgent, s’il donnera beaucoup ou peu de devoirs, et surtout, s’il racontera des histoires ? Tout en lui remettant la liste des élèves, M. le Régent explique : « Il y en a 43. C’est beaucoup ! Mais je suis persuadé que tous vous feront plaisir, car ils travaillent bien, et ne sont pas méchants. Il y a Léon, avec qui il faudra de la patience, car il est très lent à comprendre, encore plus lent à apprendre. Parfois, malgré sa bonne volonté, il n’arrive pas à savoir sa leçon. Le pauvre garçon souffre des suites d’une chute très grave alors que tout petit, sa maman travaillant à la fabrique, il restait seul à la maison. » Après cette explication, M. le Régent introduit le nouveau vicaire. 43 garçons se lèvent et saluent joyeusement : « Bonjour M. le Vicaire », tout en inspectant de haut …
lire la suite…Le bâton de Saint Joseph (Légende bretonne)
La vieille Yvonne s’assit un jour près de son rouet et nous dit : — Oui, mes enfants, le plus grand des saints du paradis, c’est saint Joseph. Écoutez bien ce que je vais vous raconter, et vous verrez si je vous ai menti. Nous nous approchâmes plus près encore de mère Yvonne, et elle commença : « Personne n’aimait Joseph Mahec, dans le pays de Kervéh qu’il habitait ; aussi vivait-il solitaire dans une cabane délabrée. On disait que le soleil lui-même avait tellement en horreur Joseph Mahec, que jamais il ne projetait ses joyeux rayons sur sa maisonnette enfumée ! Un soir de mars où Joseph Mahec allait pénétrer dans sa cabane, il se sentit tirer légèrement par le pan de son habit. Il se retourna surpris, presque en colère, car il n’était point accoutumé à ces manières. On le fuyait, mais on ne le touchait pas. Derrière lui était un vieillard courbé sous le poids des années et de la misère. Des cheveux blancs, une longue barbe, des …
lire la suite…Un nouveau saint au paradis
VI À la grille le docteur trouva sa fille. Elle avait mis son manteau. — Petit papa, emmène-moi ! — Comment ? Ne sortez-vous pas avec maman ? — Nous allons aux vêpres, mais dans une heure seulement. Le père mit sa main sur l’épaule de sa fille. Il n’ajouta rien d’autre et ils s’en allèrent ensemble. Que c’était long de monter au cinquième ! Mme Lebrun ouvrit la porte. — Je laisse, Madame, la petite sous votre garde. Il vaut mieux ne pas trop fatiguer le malade. La porte de la chambre se ferma derrière papa. Mme Lebrun tâcha de divertir Jeanne comme elle put, mais la petite fille ne s’intéressait qu’à un seul sujet. — Parlez-moi, Madame, de Michel… — Petit encore, commença Mme Lebrun, et son visage soucieux se dérida, il était déjà très bon. Je me rappelle que lui si délicat, toujours si prévenant, choisissait depuis quelque temps le plus gros morceau de pain dans le panier lorsque nous étions à table. Il le choisissait et le prenait le premier. — Pourquoi ne le manges-tu pas ? lui …
lire la suite…Pierre, soldat de chez nous
Charité envers Dieu Toute la journée le canon avait tonné sans arrêt, les mitrailleuses n’avaient cessé de crépiter et les balles de siffler. Il flottait dans l’air une âcre odeur de poudre. Le sang avait coulé, hélas ! Et le soir tombait sur le champ de bataille comme un immense apaisement. Profitant de la trêve, des brancardiers passaient, ramassant les blessés d’abord, les morts ensuite. Malgré leurs mouvements précautionneux, ils arrachaient des gémissements de douleur aux grands blessés qui gisaient sur le sol, fauchés par la tourmente. La nuit devenant dense, ils ne virent point un jeune soldat qui restait étendu à la face de Dieu, comme disait Péguy, au milieu d’un champ de blé à demi ravagé par la bataille. Au milieu des épis blonds couchés sur le sol, il était étendu, sans connaissance, un mince filet de sang coulant autour de sa tête douloureuse, de sa tête énergique de paysan. Dans le ciel, les étoiles s’allumaient les unes après les autres, semblant veiller ce terrien de vingt …
lire la suite…La visite du charpentier
Alors ? Votre voisin, l’pé Joseph, comment va-t-il, Madame Grincette ? — Il baisse… il baisse… A mon avis, il baisse de plus en plus, ma pauvre amie… Je ne crois pas qu’il reprenne jamais son rabot, à moins que ce ne soit pour faire son propre cercueil ! — Le failli homme… Il ne laissera point de regrets… un mécréant… un mal commode… — Jamais les pieds à l’église… — Ah ! si… pardon, le jour de la saint Joseph… il allait mettre un bouquet de fleurs à la statue. — Et vous croyez que le bon Dieu en était flatté ?… Qu’il ne Le priait seulement pas ! » Tandis que, sur la place, les deux commères faisaient son procès, le père Joseph, seul, dans son fauteuil, soupirait. Une seule pièce lui servait à la fois de chambre, de cuisine et d’atelier… Le bois brut et les outils voisinaient avec les meubles, et cela faisait un bizarre décor. Mais en vain le chêne et le sapin dégageaient-ils leur âcre parfum, le vieux …
lire la suite…Comment elles meurent
Tu te souviens, ma cousine, de cette soirée d’été où tu nous racontas les derniers moments de ta compagne ? Je tâcherai seulement de me rappeler tes paroles et de ne pas te trahir en les rapportant. Aussi bien est-ce une histoire bien simple que je vais vous raconter et vous raconter simplement. À quoi bon faire des phrases pour dire des choses qui furent aussi claires que le jour, aussi limpides que l’air ? La recherche est bonne pour ceux qui fabriquent les âmes des héros et des héroïnes de romans. Les enfants de lumière vivent dans la pure vérité de Dieu. Il suffit de parler comme ils ont vécu. Elle nous était venue bien malade, notre pauvre sœur Marthe ; bien malade, et, du premier coup d’œil, nous nous étions dit : « elle est perdue ». Mais sait-on jamais avec les êtres jeunes ? Il y a en eux de telles réserves, de telles ressources, de telles envies de vivre aussi, qu’ils se raccrochent à l’existence et …
lire la suite…En s’en revenant dans le sentier blanc
Dans le sentier, blanc de givre, Jean rit tout seul : il se rappelle l’histoire du couteau ! L’an dernier, pendant sa rougeole, il a demandé qu’on lui raconte une histoire, et grand-père avait commencé, sur un ton à faire frissonner tous les braves : « C’était le soir. À la lueur d’une chandelle, un homme allait à pas de loup dans la maison… » Jean retenait son souffle : « Mon Dieu ! qu’allait-il advenir ? – Soudain, annonça grand-père avec un geste épouvantable, il prit un grand couteau… » Terrifié, Jean disparut sous ses couvertures… Et l’aïeul acheva, après un petit silence : « …Il prit un grand couteau et… étendit du beurre sur son pain. » Quel fou rire, ce soir-là !… Et quel succès lorsqu’il répéta l’histoire à ses camarades ! Pauvre grand-père, si gentil ! Il fabriquait arbalètes et chariots, et jamais ne se fâchait lorsque Jean avait cassé une roue ou perdu toutes ses flèches… Hélas ! grand-père n’est plus ici : voilà trois semaines qu’il est parti chez le Bon Dieu. Jean ne met plus son pull rouge qu’il aimait bien ; Marie-Claire …
lire la suite…Le brigand de la forêt
Extrême-Onction « Ton père va mieux ? — Oui, il est revenu de l’hôpital. Même, il désire te voir, je venais te le dire. — Me voir ? Moi ?… Guilaine est intriguée. Que peut lui vouloir le père de Colette ? Elle a peur aussi de le voir encore dans le sang et avec des pansements, comme le jour de l’accident. Il y a trois semaines de cela, mais elle en est encore impressionnée. Elle jouait à la marelle, avec Josette. Elles entendaient, sans y prendre garde, le toc-toc léger d’un marteau de couvreur sur les ardoises sonores. — Tiens ! dit Guilaine, le père de Colette est sur le toit de votre grange. Elles le regardèrent une minute aller et venir sur le vieux toit, arrachant ici un coussin de mousse, poussant là une ardoise… — Brr !… je n’aimerais pas être à sa place… — Surtout sur le bord… Derrière elles, une voix les fit sursauter : — S’il n’y avait que des as de votre trempe, il pleuvrait sur votre lit, je pense ! Le facteur avait entendu leurs dires et les …
lire la suite…Le sacrement qui guérit
L’extrême-onction C’était à la sanglante bataille de la Moskowa, où Russes et Français s’étaient battus avec un acharnement farouche. Le général de Caulincourt venait d’enlever les positions ennemies pour la troisième fois lorsque la cavalerie française, ayant à sa tête le capitaine Bakel, entra comme un ouragan dans les murs de Borodino. Les Russes la saluèrent par une terrible décharge d’artillerie. Le capitaine Bakel, blessé à la jambe et à l’épaule, tomba de cheval. Ses soldats le relevèrent et l’emportèrent aussitôt au pas de course sous une pluie de balles. Peu à peu le silence se fit sur le champ de bataille… et le vaillant capitaine, ouvrant les yeux, sourit en entendant le clairon français sonner la victoire. « Nous sommes vainqueurs, murmura-t-il… J’y comptais bien ! » Cependant le chirurgien mandé en hâte auprès du blessé laissa passer vingt-quatre heures avant de venir à son chevet, tant sa tâche était immense. Comme le sang ne coulait plus le major put extraire assez facilement la balle …
lire la suite…Le terrible Purgatoire
La sainte communion secourt admirablement les âmes du purgatoire. Le vénérable Louis de Blois rapporte dans un de ses livres, qu’un dévot serviteur de Dieu fut visité par une âme du purgatoire, qui lui fit voir tout ce qu’elle souffrait. Elle était punie pour avoir reçu la sainte communion avec tiédeur. En punition, Dieu lui avait ménagé le supplice d’un feu dévorant, qui la consumait. « Je vous conjure donc, dit-elle, vous qui avez été mon ami, de communier pour moi avec toute la ferveur dont vous êtes capable ; j’espère que cela suffira pour ma délivrance ». Celui-ci s’empressa de le faire. L’âme lui apparut de nouveau, brillante d’un incomparable éclat, heureuse et pleine de reconnaissance. « Enfin, lui dit-elle, grâce à vous, je vois donc face à face mon adorable Maître », et elle s’envola au ciel. Saint Bonaventure dit que la charité devrait nous porter à communier pour les défunts, parce qu’il n’y a rien de plus efficace pour leur repos éternel. …
lire la suite…L’Extrême-Onction
Chapitre XVI Ces causeries en plein air font le bonheur de tous. Les garçons raffolent de leurs professeurs, qui, entre les leçons, organisent des courses et des parties de ballon à en perdre la respiration, comme dit un petit homme de huit ans. De plus, depuis quelques jours, le bourg est fort agité par une fête foraine qui bat son plein. Bernard a conduit « ses élèves » aux chevaux de bois, non sans fierté, car la discipline obtenue a été irréprochable. Et le grand garçon s’enthousiasme lui-même de son succès. Il se sent une irrésistible vocation d’entraineur, et voit évoluer en imagination les équipes qu’il formera un jour. Qui donc pourrait entraver ses projets ! Sur les entrefaites, sa mère l’appelle un beau matin. — Veux-tu aller à L…, Bernard, nous acheter un tas de choses ? Nous n’avons plus de soie, plus de fil d’or, plus de papier doré, plus de colle pour les décorations de l’église ; nous sommes à sec. Et puis, ton oncle voudrait que tu passes chez le …
lire la suite…