Brin d’or

Auteur : Demetz, M. | Ouvrage : Et maintenant une histoire I .

Temps de lec­ture : 5 minutes

C’est un tout petit grain de sable doré qui était arri­vé à Naza­reth sur les ailes du vent. Il s’ap­pe­lait « Brin d’Or ». Per­sonne n’a­vait remar­qué l’ar­ri­vée de cette , infi­ni­ment petite et véri­table atome dans l’im­mense struc­ture de l’Univers.

Le vent puis­sant l’a­vait dépo­sé au seuil d’une humble demeure d’ar­ti­sans. Brin d’Or, tout étour­di d’un long voyage au-des­sus des pay­sages de Pales­tine, res­tait dans l’en­coi­gnure de l’en­trée, sans bou­ger. Toute la nuit déjà il avait dor­mi là : il se trou­vait si seul… si dépay­sé ! La veille, il était encore à gam­ba­der avec ses petits frères sur la dune, et le vent s’é­tant levé de fort mau­vaise humeur était venu le ravir à l’af­fec­tion des siens.

Conte et Vie de Jésus pour les petits - NazarethPen­dant des heures, il l’a­vait entraî­né en un vol éper­du et puis l’a­vait lais­sé choir, sans l’a­ver­tir. C’est ain­si que le souffle de l’é­preuve entraîne les hommes, petits et grands, qu’ils le veuillent ou non, dans une che­vau­chée pleine de mys­tère. Il les dépose tout meur­tris en des lieux incon­nus ; si ce n’est pas à Naza­reth comme Brin d’Or, c’est sou­vent bien près du Divin Arti­san qui habi­tait cette humble bourgade.

Le soleil d’o­rient res­plen­dis­sait et dar­dait ses rayons ardents sur les cam­pagnes, sur les mai­sons aux riantes ter­rasses. Brin d’Or com­men­çait à se réchauf­fer ; il était assoif­fé de lumière et de cha­leur et ce soleil lui ren­dait toute sa vigueur.

Il s’en­har­dit, un peu indis­cret peut-être, regar­da à l’in­té­rieur de la mai­son qui avait abri­té son som­meil et, d’é­ton­ne­ment, pas­sa au ravissement.

Oh ! ce que vit Brin d’Or lui fit oublier à tout jamais sa dune… Dans un pou­droie­ment léger de sciure blonde, un jeune ado­les­cent d’une idéale beau­té tra­vaillait, légè­re­ment pen­ché sur un éta­bli de menui­sier ; il maniait habi­le­ment le rabot. Sous sa main nais­saient des flots soyeux de copeaux dont les spi­rales venaient se mêler par­fois aux longues boucles de sa che­ve­lure. En s’ar­rê­tant pour s’é­pon­ger le front, son beau regard pro­fond tom­ba sur Brin d’Or et s’ar­rê­ta un moment sur cette infi­ni­ment petite mer­veille de la nature. Le petit grain de sable doré en tres­saillit de joie et mur­mu­ra tout exta­sié : « Sei­gneur, je Vous aime et je veux res­ter avec Vous toujours. »

Légende et vie de Jésus : La sainte-Famille - atelier de Saint JosephDepuis cette inou­bliable ren­contre, Brin d’Or s’est atta­ché à res­ter tou­jours avec Jésus ; il a pris demeure dans l’a­te­lier de saint Joseph et il reste là, tout heu­reux d’être auprès du Maître.

Il a bien failli avoir des déboires avec la Sainte Vierge, parce que cette ména­gère admi­rable aimait la pro­pre­té et, la jour­née de tra­vail finie, venait balayer minu­tieu­se­ment l’a­te­lier. Natu­rel­le­ment, le pauvre Brin d’Or reçut son arrêt d’ex­pul­sion avec toutes les autres pous­sières dès son pre­mier jour d’arrivée.

Croyez-vous qu’il se tint pour bat­tu ? Ah ! non point. Il avi­sa un pot de fleurs — car la Sainte Famille aimait et culti­vait les fleurs — et se glis­sa par­mi la terre de celui-ci. Dès le matin, les feux du jour le fai­saient scin­tiller et Jésus le regar­dait en souriant.

Les années s’é­cou­lèrent dans la paix pour Brin d’Or ; il se plai­sait dans l’am­biance de cette mai­son sainte et labo­rieuse. Mais, sur la terre, tout a une fin, et vint le temps où le Maître com­men­ça sa vie publique.

Adieu la paix de la vie de famille, paix humble et cachée. C’est l’heure des longues marches fati­gantes sur toutes les routes pour annon­cer au monde la bonne nou­velle de l’É­van­gile, c’est l’heure des gué­ri­sons, de l’en­thou­siasme des foules, de la haine per­fide des pharisiens.

Brin d’Or est avec Jésus par­tout : il ne Le quit­te­ra pas ; il s’est fau­fi­lé dans un pli de son vête­ment, tout près de son Cœur, et le Maître ne l’a pas repous­sé ; l’in­fime pous­sière demeure avec le Créa­teur. Jusque dans la fla­gel­la­tion, il n’a pas bou­gé ; mais quand les sol­dats arrachent les vête­ments de la Vic­time qui ne se plaint pas, Brin d’Or quitte brus­que­ment sa retraite et se jette dans un flot de sang qui colle au Corps de Jésus. Rien ne le sépare de son Dieu ; pas même Véro­nique ne réus­si­ra à le reti­rer ; quand le Maître expi­re­ra, il sera là tou­jours, ser­ré contre Lui… jus­qu’au tombeau.

Mais, au matin de Pâques, lorsque Jésus sor­tit tout res­plen­dis­sant de gloire, on ne vit plus trace de Brin d’Or sur la terre.

« Il devait être en Para­dis, me dit le vieil oli­vier qui m’a conté cette his­toire. Va et fais comme Brin d’Or ; tu n’es qu’une pous­sière mais Dieu t’aime, tu es son enfant », ajouta-t-il.

M. Demetz.

Conte et Légende pour les enfants : La vie de Jésus

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